Naji El Khatib,
Publié le 13.0.2020
Les changements de ces dernières années dans la situation internationale et leurs conséquences menacent dangereusement la cause palestinienne. En France, la politique étrangère actuelle tranche avec celle de la période « gaulliste », où tout en faisant partie du système impérialiste, elle se différenciait un peu de la politique des États-Unis. Et que dire de la visite du ex-ministre d’extrême droite italien Salvini en visite à Tel-Aviv (11 déc. 2018) , déclarant que «l’État d’Israël est le refuge des valeurs occidentales»? Tout cela met en péril la cause palestinienne.
Les régimes arabes suivent cette tendance, comme on le voit avec l’accord entre l’Arabie saoudite et Trump, ou le fait que Netanyahou a été reçu, pour la première fois, par le ex-sultan d’Oman, Qabus bin Saïd (décédé le10 janvier 2020).
Pour la première fois, les régimes arabes parlent du « droit des Israéliens en Palestine »(précisons : nous parlons ici du sionisme, et non des Juifs qui ont toujours fait partie des populations vivant au Moyen-Orient). Ces régimes n’ont pas changé de nature. Mais jusqu’à un passé récent ils étaient contraints de faire référence à la cause palestinienne pour ne pas provoquer leurs propres peuples. Aujourd’hui, ils ne s’embarrassent plus de ça.
Trump a déclaré que la politique des États-Unis vis-à-vis de l’Arabie saoudite était conditionnée par la protection que celle-ci exerce sur l’État d’Israël, sans laquelle, a dit Trump en substance, l’État d’Israël ne pourrait se maintenir. Ce qui a provoqué des protestations indignées de la droite israélienne… Mais c’est un fait qu’aujourd’hui, la collaboration entre les États-Unis, les régimes arabes et l’État d’Israël – dont le peuple palestinien est la première victime – est vitale pour les uns comme pour chacun d’entre eux.
Savez-vous que le logiciel espion qui a permis aux Saoudiens de liquider le journaliste Jamal Khashogi a été fourni par les Israéliens aux Saoudiens ? Savez-vous que, dans la sale guerre de la « coalition arabe » dirigée par les Saoudiens et les Émiratis au Yémen, dans les troupes mercenaires de la compagnie Blackwater, combattent des officiers israéliens à la retraite sous uniforme des Émirats arabes unis ? Ce sont des informations que le citoyen égyptien, jordanien ou palestinien lit chaque jour dans les journaux.
Mais les dangers pour la cause palestinienne ne sont pas limités, hélas, aux seuls développements politiques sur la scène internationale, ni à celle des pays de la région. Il faut y ajouter la « coopération sécuritaire sacrée » – pour reprendre le terme employé par Abou Mazen (Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne) avec l’État d’Israël. Nous voyons depuis des années ceux qui étaient hier les militants de la lutte nationale se transformer en une bourgeoisie compradore au service de la colonisation.
La cause palestinienne est en grand danger. Il y a urgence à inventer de nouvelles formes d’alliance et de coopération entre les travailleurs et les peuples en lutte contre l’injustice sociale, la spoliation des terres et l’exploitation capitaliste.