Vers un MOUVEMENT POPULAIRE

Salameh Kaileh Portrait

« Vers un MOUVEMENT POPULAIRE POUR UN ÉTAT UNIQUE LAÏQUE ET DÉMOCRATIQUE EN PALESTINE »

Texte-fruit des débats entre militants de la mouvance de « One Democratic State » rédigé par Salameh Kaileh après plusieurs modifications (2017)

Dès le début, il n’y avait pas de solution en Palestine pour le conflit entre le mouvement Sioniste et le peuple palestinien, sauf la création d’un seul État laïque et démocratique, qui a été proposé à la veille de la Nakba de 1948 et également par la suite. Cette proposition a été abandonnée en 1974 par l’OLP puis remplacée par la solution de l’« État indépendant » sur 20% de la terre de Palestine, entrainant la reconnaissant de l’État sioniste comme un État « juif ». En effet, cette option a exclu les Palestiniens, des territoires occupés en 1948 et tous les réfugiés en dehors de la Palestine, de l’équation palestinienne. Il s’agit là d’une déviation majeure au regard de la proposition palestinienne initiale.

Aujourd’hui, il reste évident qu’il n’y a pas de solution, sauf celle basée sur le fait que la Palestine doit être considérée comme un seul pays, ce qui implique l’existence d’un seul État laïque et démocratique sur sa terre pour tous ses citoyens. En particulier, il est devenu évident que la solution des Deux États a été sans horizon viable, une pure illusion alors que le projet de l’État sioniste demeure un projet de colonisation de toute la Palestine à travers une politique systématique de nettoyage ethnique de toute la Palestine, aux fins de la transformer en une « Terre d’Israël ». C’est donc dans cette perspective colonisatrice, que l’occupant continue à marginaliser, persécuter et étouffer les Palestiniens qui vivent encore en Palestine, au point d’établir un système d’apartheid en enfermant la population palestinienne dans ghettos et cantons séparés par le mur de séparation et en la soumettant à une exploitation économique flagrante. Ce système est basé également sur l’élimination des palestiniens de tous les cadres politiques de l’État, au prétexte de leur accorder une « autonomie élargie », tout en les exploitant économiquement en leur « fournissant » les salaires les plus bas.

En conséquence, la solution réelle à la question palestinienne doit être revisitée à la lumière de la politique de l’État sioniste, qui consiste à coloniser la Palestine pour la transformer en un « État juif » et en une « base militaire » avancée dans le projet de domination impérialiste sur le Monde Arabe ; c’est ainsi dans le but de le maintenir en état de sous-développement et de désintégration, afin de l’exploiter plus efficacement. Ainsi, la question palestinienne est certainement une question arabe, et sa solution est étroitement liée à la situation du monde arabe dans son ensemble. Par conséquent, la lutte politique palestinienne doit être reconstruite sur une base claire, en s’affranchissant des labyrinthes découlant de pseudo-solutions, de négociations interminables et de concessions incessantes. Cette reconstruction du projet palestinien est plus que nécessaire à ce moment aussi crucial, alors que l’État sioniste a annexé la quasi-totalité de la terre palestinienne occupée de 1948 et une grande partie de la terre palestinienne occupée en Cisjordanie tout en imposant un siège insupportable sur la bande de Gaza malgré l’avoir évacué.

Sur la base du document de Munich (1 Juin-29 Juillet 2012) concernant l’État démocratique unique en Palestine historique, nous proposons notre conception sur la fondation du « Mouvement pour la Palestine : un seul État laïque et démocratique ». Il s’agit d’un mouvement travaillant pour une participation plus large du peuple palestinien en Palestine et dans la diaspora dans cette lutte, ainsi que la participation de la population juive dans cette lutte commune qui vise à la formation d’une alternative populaire porteuse du projet de l’État démocratique et laïque. Ce projet a ainsi pour objectif de développer des luttes sous diverses formes pour déconstruire l’État sioniste et reconstruire la société et l’État basé sur les principes clairement résumés dans ce qui suit :

1) La solution doit commencer par le démantèlement de l’État sioniste en tant qu’entité politique et militaire et de son idéologie raciste. C’est le fondement qui régit notre vision et qui pose les bases d’une véritable solution à ce conflit centenaire, déclenché par la publication de la Déclaration de Balfour en 1917. De plus, nous ne traiterons pas ici de l’avènement d’une entité présentée faussement comme un « Refuge » pour les victimes du nazisme, mais en tant qu’entité coloniale, partie intégrante du système impérialiste de domination sur les pays arabes. Le caractère militariste de cette entité va évidemment de pair avec la domination impérialiste du contrôle et d’expansion. Le démantèlement de cette entité serait alors une nécessité pour débarrasser la région des effets néfastes de l’impérialisme.

2) Cette solution doit garantir des droits pour tous, sans exception. Les droits du peuple palestinien sont imprescriptibles, en particulier le droit au retour pour tous les réfugiés et l’indemnisation des biens perdus. Ces droits sont inaliénables, non négociables, et c’est un principe fondamental pour toute solution future. En effet, la conséquence première de ce principe fondamental est qu’il entre en conflit direct avec les intérêts et les privilèges accordés par le système colonial à la communauté juive après 1948 (suite au processus de nettoyage ethnique, d’expulsion des Palestiniens, de confiscation de leurs terres et leurs biens, de remplacement de la population par une politique de colonisation de peuplement). Le préjudice des palestiniens qui en découle est extrêmement lourd (propriété ou logement, terrain de village détruit) et doit nécessairement proposer une réparation selon les principes de la justice, mais sans créer de nouvelles souffrances et dommages, cette-fois-ci, à cette communauté juive. La justice pour les Palestiniens signifie également l’acceptation par la communauté juive en Palestine d’interroger ses avantages et privilèges que l’État sioniste lui a accordé. L’État laïque et démocratique pour tous ses citoyens garantira donc les droits pour toutes et tous, sans privilèges fondés sur des appartenances particulières.

3) Le nouvel État qui sera construit sur la terre historique de la Palestine, est un État palestinien, il est aussi un état démocratique et laïque, qui sépare la religion de l’État et qui protège la liberté de croyance religieuse, ainsi que les libertés fondamentales. C’est un État qui repose naturellement sur le principe de la citoyenneté, sur la protection des classes populaires et qui instaure des mesures économiques et sociales contre la pauvreté et le chômage. Il assure également l’éducation gratuite et garantit la protection sociale et le droit du travail. Il sera soucieux de l’épanouissement des arts et de la culture.

4) La résolution du conflit aura pour conséquence de redessiner la carte démographique de la répartition de la population parmi les Palestiniens arabes, les Juifs arabes et les Ashkenazim. La question des minorités culturelles distinctes sera mise en évidence, aussi le droit à l’autonomie culturelle sera reconnu ainsi que l’araba et l’hébreu comme deux langues officielles, tout en notant la relation étroite entre ces deux langues.

5) Le démantèlement de l’État sioniste signifie également la fin de l’hégémonie du capitalisme par la réduction des liens avec l’impérialisme : une tâche importante à accomplir pour la construction d’une l’économie sur de nouvelles bases reflétant les intérêts des classes populaires, en particulier. Dans ce contexte, les problèmes majeurs créés par le colonialisme de peuplement, avec son système capitaliste seront résolus à la fois en termes de répartition démographique et en termes de différences significatives dans le niveau de vie. La solution de ces problèmes ne sera possible qu’en dehors du système capitaliste.

6) La construction de cet État sera le résultat d’une lutte multiforme, nationale et de classe. Une lutte commune entre le peuple Palestinien, et les Juifs qui se seront débarrassés de l’idéologie sioniste. Cette lutte commune est cruciale et décisive, mais il est possible que dans le cadre d’une véritable solution qui garantisse les droits pour tous. Il convient souligner le lien unissant cette lutte avec toutes les autres luttes dans le monde arabe, de par la place centrale de la Palestine dans la région, mais également par ce que la présence sioniste en Palestine a eu pour but d’empêcher l’indépendance, l’unité et le développement de l’ensemble de Monde Arabe.

7) Il faut souligner le rôle des peuples du monde dans cette lutte. On peut légitimement considérer que le projet de l’État sioniste était à l’origine un produit du projet colonial de peuplement, dans un contexte historique correspondant à un moment particulier de l’évolution du système capitaliste international. Par conséquent, tous ces peuples sont invités à participer à cette lutte, soit en exerçant une pression sur leur gouvernement pour définir des politiques basées sur les principes de justice et du droit, soit par le boycott de l’État sioniste, puisqu’il représente un projet étatique basé sur le racisme et l’apartheid et sur l’utilisation de la religion dans son projet politique. Il s’agit d’un État utilisant la violence et l’expulsion des peuples autochtones, et se mettant au service de l’impérialisme pour le contrôle des ressources de tous les peuples de la région et du monde entier.

Telle est notre vision contenue dans ce document fondateur du « Mouvement populaire pour la Palestine : un seul État laïc et démocratique, » ; une vision pour reconstruire la lutte d’une nouvelle perspective, capable d’établir un courant populaire et large auprès de toutes celles et ceux qui s’identifient à notre vision pour la Palestine : un seul État laïque et démocratique.